Critique DIORAMA III ULTRA LAB

Le collectif Ultralab™ présente dans la continuité de ses prospections sur les mondes virtuels Diorama III « La vie en temps de paix » à la galerie Magda Danysz. Cette exposition se déroule dans le cadre de Zone 5, une plate forme de création prolongement de Tokyozone. Après Ultracity™, la mégalopole pirate, et Gomipark®, le complexe de traitement des données toxiques, Ultralab™ s’attaque à la représentation de la guerre dans notre monde occidental. Un monde occidental parsemé d’univers fictifs, fruits de l’industrie du film et des jeux vidéos. Sous la forme complexe d’une installation plastique et multimédias, ces artistes interrogent l’absurdité et la fascination que suscite la guerre.
En prélude au jeu qui va s’engager : « un mystérieux appareil sans pilote, un drone, se crashe dans une tranquille zone semi-urbaine ». On ne sait pas si cet élément est une fiction pénétrant la réalité, ou une réalité support à une fiction. Dans la première salle, il s’ensuit un minutieux travail de décomposition et de recomposition, afin de restituer les éléments constitutifs du scénario et du théâtre des opérations.
Des maquettes de drones et de blockhaus sont accrochées au plafond et sur des socles. Sous des vitrines des petits soldats de plomb ou de plastique. Hussards, marines et poilus en tout genre se côtoient près de coupures de journaux traitant de la guerre. Au sol des bacs sont alignés dans lesquelles on a accumulé une collection des revues spécialisées de maquettisme et sur des engins de guerre. Sur les murs, des impressions numériques de propagandes Diorama III™ « one Shot » et divers schémas tactiques.
A mesure de notre progression dans l’espace d’exposition, le puzzle se reconstitue… La salle est baignée par le son du fracas des explosions et du froissement de l’acier arraché par leur souffle.
Deux écrans munis de casques présentent des extraits d’images guerrières. L’un d’eux passe en boucle des extraits de films et de dessins animés. Les explosions de bombes se succèdent à un rythme impressionnant. Devant tant de violence et de destruction, personne n’est à l’abris de ce qui peut survenir à tout moment. Sur l’autre écran, des extrais de jeux vidéos Doom-like (jeu de tir à vue), sans l’interface du joystick ! Emporté par l’action, le joueur qui voit le monde au travers de la mire d’un viseur, restera impuissant et frustré en voyant mourir son avatar, sans défense.
Ce diorama fragmenté commence à prendre consistance dans la seconde salle. Nous avons accès à la console de jeu, au terrain de l’otaku, du rôliste, du game player ou bien même d’un général de l’armée à la retraite, en mal de stratégie de combat. Tout ce précise, cette ville s’appelle « gris » et, moi le joueur, je suis à la recherche du drone qui vient de ce crasher. L’univers du jeu est désertique et impersonnel, l’ennemi serait présent, mais décidément, il ne se montre pas. Seul s’y trouve la figure obsédante du drone.
Cette situation serait-elle si absurde ? Ce jeu n’aurait d’autre finalité que d’offrir le cadre d’une stimulation suffisante et même nécessaire, pour ne pas céder à la folie de la grisaille quotidienne des grandes mégalopoles. Pourtant la guerre est bien là, mise à distance par ce drone, un radar ou un missile tactique à tête chercheuse. La guerre serait conçue tel un jeu vidéo ou inversement, un guerre sans morts et que des ressuscités.
C’est peut être ce que dénonce Ultralab. En incitant le spectateur à réfléchir sur son champ narratif, ils invitent à redéfinir les règles du jeu et à « rechercher des formes inédites d’autonomie artistique, économique et politique ».